162                       Les Spectacles de la Foire.
Entendriez-vous malice à ce vers-là? Pour le coup, c'en eft trop. Vous avez aflez d'efprit pour m'en prêter, mais je vous dois déjà beaucoup, et je ne veux pas me furcharger d'obligations nouvelles. Vous finiffez votre épître par un quatrain barbare, anti-poétique et furtout maladroit. Le public,.dont la faveur vous enivre, n'aime pas qu'on s'en targue infolemment pour humilier les au­tres. Enfant gâté de ce public, vous ne connoiflez que fés bien­faits, apprenez à connoître, à refpecter fon équité. Rayez-moi donc ce quatrain impoli ; je ne fais pas ce qu'il vous a coûté, ■ mais l'euffiez-vous eu pour ce qu'il vaut, vous auriez fait un mauvais marché. Sordes emere ftultum ejl. Je vous demande par­don d'avoir parlé latin. Il faut terminer. Je réprime des farcafmes alTez gais qui s'offrent à mon imagination. Tenez-moi compte de ce que je ne vous ai pas dit, et convenez que votre lettre méritoit une autre réponfe. Vous n'en êtes pas moins xxks-honnête, car vous l'avez dit, et je fuis affez crédule pour jne demander à per-' fonne ce que je dois en penfer. J'ai l'honneur d'être, etc. Signé : Parifau. »
Malgré cette spirituelle épître, c'est Parisau qui avait tort de se plaindre, car Audinot s'était conduit loyalement dans cette affaire. C'est du moins ce qu'affirme Mayeur de Saint-Paul dans une lettre-insérée dans le Chroniqueur désœuvré (i). Mllc Bonnet,
(:) Cette lettre est ainsi conçue : n Aux auteurs du Journal de Paris. Melieurs, je \icns dc rece­voir votre journal ct l'ayant ouvert avce l'cmprcffcment qu'on met à pofféder cc qui fait nous inte* reffer.ct nous plaire, mes yeux fe font arrêtes fur une lettre lignée du fieur Audinot, directeur du fpectaclc connu fous le nom de rAmbigu-Comiquc. Comme je fuis en partie l'inflrument dc l'al-tercation élevée entre MM. Audinot et Parifau ct quc je puis rendre au premier toute la juilice qu'il réclame, vous m'obligerez, Mcffieurs, dc faire part au public dc la dépofition quc je remets entre vos mains puifque votre journal cli le dépoiitairc dc la réclamation du lieur Audinot. Jouant a fon fpectaclc et ne cherchant, aprés le défir dc plaire au public, que celui d'étre agréable ct utile a mon directeur, je lui préfentai la demoifellc Bonnet (connue fous le nom de l'Amour depuis qu'elle a joué ce rôle au fpcctacle des Élèves), quc ['avois pris foin de former pour nos théâtres, en lui faifant quelques roles dans de petites piéces que je compofois pour des fociétés. Douce d'une intelligence furprenante, je m'imaginois quc cette cnfant,T~âgèe de fept ans et demi, après avoir fait le charme dc bon nombre d'aflerablécs, feroit reçue avec tranfport par le fieur Audinot. Mes efpéranccs furent déçues; elle entra donc aux Élèves de l'Opéra. Au milieu dc l'année paflee, fa mère, voyant le délabrement de ce théâtre, me pria de l'offrir de nouveau au fleur Audinot. Je le fis ; nouvelles marques d'indifférence dc fa part. Enfin, ayant récidivé pendant cette dernière quinzaine de Pâques (toujours aux follicitations de fa mére) et cette fois fatiffait du fieur Audinot, je lui amenai la demoifelle Bonnet. Je fus témoin de leur converfation et je puis attefter comme l'allègue le fieur Audinot qu'il a rcfufé d'engager ladite demoifelle Bonnet avant le terme où expi­rent les engagemens de comédie. 11 alla meme jufqu'a la refufer encore cn difant que Ie public